2 février 2008

Machine à remonter le temps





"Un recensement effectué en 1886 comptait 1 126 000 immigrés en France, sans parler des saisonniers. Nos compatriotes, en ces temps reculés, étaient racistes. Des ratonnades avaient lieu parfois, à Marseille par exemple. Contre les Italiens, accusés d'être des pouilleux, de violenter les femmes, de voler leur travail aux bons français. L'une à Aigues-Mortes, en 1881, fit trente morts. Une autre fois en 1911 à Paris, toutes les boutiques d'alimentation ritales et juives, donc tenues par des affameurs étrangers, furent pillées. Heureusement, à force de réciter en choeur "Nos ancêtres les Gaulois", tout finit par s'arranger. (...)"


"Pour tenir à leur place ces êtres que les loubards de banlieue nomment en verlan rebeux, les autorités ont créé des ghettos à leur semblance, où il paraissent prospérer, la cité des Flamands à Marseille, Picon ou la Busserine, talus dégoulinants de boue, vagues terrains de rebut où rient des gosses hâves parmi les baraques à lézardes: des lieux où peut s'épanouir la civilisation qu'ils aiment à base de crasse de misère et d'ignorance. Les gardiens de la paix entourent ces bas-fonds de rondes et de contrôles incessants. Afin que ces hères ne risquent pas d'envahir les logements pour vrais français, où ils élèveraient leurs chèvres dans les baignoires, les municipalités établissent des quotas. Pour que les gosses ne cèdent pas à la tentation de s'assimiler, les enseignants les maintiennent dans les classes poubelles. Question boulot, comme on a pris soin de ne leur laisser acquérir aucune spécialisation, ils n'en trouvent pas. Ce qui démontre à quel point ils sont fainéants. (...)"


"Il a eu deux potes tués, Moussa, à la cité des Flamands : Nouari, abattu par un CRS, au cours d'un "contrôle"; Zaïr, 17 ans, tué par un civil qui lui reprochait d'être trop bruyant. Le CRS a été remis en liberté. Le civil ne risque pas grand-chose. Moussa est ingrat. Il a le droit de vote. Encore faut-il y croire."

Extrait de "ça n'arrive qu'aux autres" de Bernard Thomas, chroniques du Canard Enchaîné du 22.4.1981.

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