8 mai 2011

Atomes al dente



En Italie, les 12 et 13 juin prochains, devrait avoir lieu l'une des consultation électorale les plus importantes depuis une vingtaine d'années. La constitution italienne prévoit la possibilité de consulter les citoyens par referendum afin de recueillir leur assentiment à l'abrogation de certaines dispositions législatives: cette procédure est connue sous les termes referendum abrogativoTrois questions ayant trait à l'abrogation de trois dispositions législatives devraient ainsi être posées au peuple italien. 
La première concerne l'instauration de la procédure d'empêchement à un procès pénal et vient s'empiler sur la liste tristement longue des modifications ad personam du code de procédure pénal italien, taillées sur mesure pour B. Je vous passe les détails.
La seconde concerne la privatisation de la distribution de l'eau, et, si elle n'est pas abrogée, fera connaître aux italiens les joies de la gestion déléguée de la flotte. La France commence enfin à sortir la tête de ces eaux là, les italiens eux s'apprêtent à y plonger.  Après trente piges de gestion de l'eau par la Lyonnaise et la Générale (devenue Veolia) même les plus rétifs aux régies publiques ont fini par être convaincus d'arrêter les frais, c'est dire...Là aussi, je vous passe les détails.
La troisième question est sans doute la plus délicieusement irradiante. En réalité elle fait indéniablement froid dans le dos, même si on peut rêver encore longtemps qu'elle soit posée aux citoyens de l'hexagone. Elle consiste à demander aux électeurs de la péninsule s'ils souhaitent l'abrogation de la loi engageant l'Italie dans un programme de construction de centrales nucléaires. Petit flashback...En 1987, les italiens sont consultés par referendum sur la même question et, la gueule encore pâteuse du nuage de Tchernobyl, avaient dit basta! Depuis, des pelletées de sables ont été jetées sur les barres de graphite et B. a remis le sujet au gout du jour. L'Italie aura donc son parc nucléaire, et pas n'importe lequel puisqu'il sera français môssieur! Lauvergon (Areva) et Sarko ont fait les yeux doux au cavaliere, mais l'histoire ne dit pas si les termes finaux de l'accord ont été négociés au cours d'une des désormais fameuses bunga bunga!...
L'encre est à peine sèche sur le contrat qu'un grain de sable se glisse dans les barres de combustible: un petit incident de niveau 7 dans la centrale de Fukushima au Japon. La situation devient soudainement critique: rendez-vous compte si les italiens se déplaçaient en masse et que la participation au referendum atteigne le quorum? Pire, et si emportés par leur élan les électeurs rejetaient le paquet complet, déclenchant du même coup un tsunami judiciaire sur la collection de procès au pénal de B. et douchant au passage le business plan des transnationales de la flotte? 
Le gouvernement italien a donc bricolé vite fait un moratoire destiné à congeler le programme nucléaire et dans le même temps à torpiller la troisième question du referendum. En effet, en vertu d'une loi constitutionnelle de 1970, si la disposition législative objet du referendum est abrogée avant sa tenue, alors ce dernier est caduc. La question est désormais entre les mains de la cour de cassation italienne ("bureau du referendum") qui, en toute logique, devrait faire fi de cet artifice et confirmer la tenue de la consultation des 12 et 13 juin 2011. Du moins il faut l'espérer...
Ensuite restera aux électeurs italiens la tâche de couler un sarcophage de béton définitif sur ces projets mortifères. Dans un pays à fort risque sismique, où la mafia gangrène la plupart des appels d'offres et sans même parler du drame des déchets dans la région de Naples, la seule voie possible est le rejet de cette greffe.
Popolo italiano, svegliati!

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